Les dispositions complémentaires concernant l’élargissement de la Communauté, prévues à l’article 19 bis du règlement CEE 1768/92, doivent-elles être interprétées en ce sens que la date d'obtention de l’AMM communautaire pour un médicament corresponde à la date d'entrée en vigueur en Lituanie de l'AMM communautaire, c'est-à-dire à la date de l’adhésion de la Lituanie, cette dernière étant postérieure ?La société Kirin Amgen Inc. a, le 16 août 1994, déposé pour son médicament l’Aranesp, une demande de brevet européen dont les effets ont été étendus à la Lituanie. Le 8 juin 2001, la société a obtenu une AMM communautaire. Le 29 octobre 2004, elle a demandé un certificat complémentaire de protection (CCP) auprès des autorités lituaniennes, soit moins de six mois après que la Lituanie a adhéré à l'Union européenne (adhésion au 1er mai 2004). Le CCP lui a été refusé par les autorités compétentes.
En matière de certificat complémentaire de protection, le règlement CEE 1768/92 modifié a prévu des dispositions transitoires pour les nouveaux États membres adhérant à l'Union européenne. L'article 19 bis s'applique aux nouveaux États membres, le point e) visant spécifiquement la République de Lituanie. Il dispose que « tout médicament qui est protégé par un brevet de base en vigueur, demandé après le 1er février 1994 et pour lequel, en tant que médicament, une première AMM a été obtenue en Lituanie avant la date d'adhésion, peut donner lieu à la délivrance d'un certificat, à condition que la demande de certificat ait été déposée dans les six mois suivant la date d'adhésion ». En l'espèce, le médicament en cause, l’Aranesp, n'a pas obtenu d'AMM par les autorités lituaniennes mais une AMM communautaire. Le juge précise que la disposition en cause « étant rédigée en des termes clairs et dépourvus d'ambiguïté » doit être, comme toute disposition transitoire, strictement interprétée.
Il ajoute que la date d'obtention de l'AMM communautaire, le 8 juin 2001, ne peut être confondue avec la date d'entrée en vigueur en Lituanie de l'AMM communautaire, le 1er mai 2004. La société Kirin Amgen ne peut donc pas se prévaloir de cette dernière date pour faire courir le délai de demande du CCP. Il précise enfin que l'objectif général du règlement 1768/92 « d'accorder une protection uniforme pour un médicament sur tout le territoire de l'Union » ne saurait faire obstacle aux dispositions transitoires adoptées, même si ces dernières gênent temporairement le fonctionnement du marché intérieur. Les États membres nouveaux adhérents peuvent justifier d'objectifs légitimes liés à leur politique de santé « incluant le cas échéant la stabilité financière ».
La Cour dit donc pour droit que « les articles 7 et 19 bis sous e) du règlement CEE n° 1768/92 du conseil du 18 juin 1992, [...] doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne permettent pas au titulaire d'un brevet de base de demander aux autorités lituaniennes compétentes, dans un délai de six mois suivant la date d'adhésion[ ..] à l'Union européenne, la délivrance d'un certificat complémentaire de protection lorsque, plus de six mois avant la décision, une AMM a été obtenue pour ce […] médicament [...] mais qu'un tel produit n'a pas obtenu une autorisation de mise sur le marché en Lituanie ».