À l’occasion de sa conférence de presse de rentrée, la FHF est revenue sur les difficultés rencontrées par les hôpitaux publics cet été, en hausse, et rappelle que celles-ci ne sont pas une fatalité. L’enjeu est de poursuivre les recrutements et la fidélisation des professionnels pour rouvrir des lits d’hospitalisation, et de renforcer la contribution de l’ensemble des acteurs d’un territoire en cas de tension dans un service d’urgences.
Sur le plan des ressources humaines, la grande enquête conduite par la FHF pour l’année 2023 montre des signaux positifs pour l’attractivité des métiers, notamment du côté du personnel non médical. La poursuite de cette dynamique ne va pas de soi et appelle à un soutien durable de la part des pouvoirs publics, car beaucoup reste à faire alors que les tensions sur les effectifs persistent.
La FHF rappelle que le nerf de la guerre est budgétaire et demande donc des financements à la hauteur des coûts supportés par les établissements publics : l’hôpital public a besoin de 2,4 milliards d’euros supplémentaires sur l’année 2024 et d’une réévaluation de l’ONDAM établissements pour 2025 de l’ordre de 3,9 milliards d’euros.
La FHF demande une stratégie claire, assumée et pluriannuelle pour améliorer l’accès aux soins et la prévention, et sortir du pilotage à courte vue qui enferme le système de santé dans l’urgence permanente.
La FHF alerte enfin sur la situation préoccupante des Ehpad, qui connaissent un déficit sans précédent. L’heure doit être à la mise en place d’un plan de sauvetage des établissements les plus en difficulté et à la correction des inégalités socio-fiscales qui continuent d’exister avec le secteur privé.
APRÈS UN NOUVEL ÉTÉ SOUS TENSION POUR LES HÔPITAUX PUBLICS, LA FHF DEMANDE DES SOLUTIONS DURABLES ET CIBLÉES
En vingt ans, l’activité des urgences a doublé pour atteindre près de 22 millions de passages chaque année, dont 80 % sont assurés par les seuls hôpitaux publics. Dans ce contexte, l’été représente une période particulièrement délicate pour les établissements de santé publics, notamment du fait de la diminution des capacités de prise en charge en ville ou dans le secteur privé. L’été 2024 ne fait pas exception.
Les données remontées par la FHF montrent que pour l’essentiel des établissements de santé publics, la situation estivale est stable (46 %) ou en dégradation (39 %) par rapport à l’été 2023. Les difficultés identifiées sont principalement : celle ducapacitaire des établissements, que ce soit en médecine (66 % des établissements), en soins médicaux et de réadaptation (51 %) ou en psychiatrie (43 %) ; celle des tensions sur les effectifs médicaux pour une large majorité des répondants (62%), mais aussi les effectifs non médicaux (37 %). Dans ce contexte, les hôpitaux ont essentiellement eu recours aux heures supplémentaires (64%) et à l'intérim (48%) pour maintenir l’accès aux soins.
Enfin, si les données de la FHF relèvent une meilleure anticipation des situations critiques au niveau local avec l’appui des ARS, la question de la solidarité territoriale reste entière, avec en particulier une contribution insuffisante des établissements privés en cas de tensions à l’échelle du territoire.
Des solutions existent pour que ces difficultés cessent de se répéter d'année en année. À cette fin, la FHF demande :
- D’une part, une meilleure orientation des patients entre médecine de ville et hôpital public, avec la poursuite du déploiement des services d’accès aux soins sur tout le territoire ;
- Ensuite, une meilleure contribution de tous les acteurs de santé des territoires, en particulier en matière de permanence des soins en établissement de santé.
SUR LE PLAN DES RH, LES DIFFICULTÉS SUBSISTENT MALGRÉ DES SIGNAUX ENCOURAGEANTS EN MATIÈRE D’ATTRACTIVITÉ
La FHF a mené ces dernières semaines une grande enquête auprès des hôpitaux publics qui permet d’objectiver la situation sur le plan des ressources humaines pour la totalité de l’année 2023. Celle-ci révèle plusieurs signaux positifs sur le plan de l’attractivité des métiers hospitaliers, malgré des difficultés persistantes.
Concernant le personnel non médical :
- Le taux de postes vacants poursuit sa diminution, en particulier du côté des infirmiers avec seulement 3 % de vacance en 2023 (contre 5,7 % en avril 2022) ;
- L’absentéisme continue également de décroître pour s’établir (tous établissements confondus) à 9,5 % (contre 11,1 % en 2022), soit le niveau le plus bas observé depuis le Covid.
- La moitié des CHU notent une progression des recrutements de soignants en sortie d’école entre l’été 2022 et l’été 2023 ;
Au sujet du personnel médical : 98% des établissements répondant rapportent des difficultés de recrutement dans au moins une spécialité. Ces difficultés de recrutement génèrent, dans trois établissements sur quatre, une augmentation du volume de temps de travail additionnel, une augmentation du recours aux praticiens à diplôme hors Union Européenne ainsi qu’un recours à l’intérim.
Dans cette situation, la priorité doit être de soutenir la reconquête progressive de l’attractivité des métiers hospitaliers et de la fidélisation des professionnels. Une sous-évaluation des moyens dont l’hôpital public a besoin risquerait de casser cette dynamique et d’accentuer par ricochet les difficultés auxquelles sont toujours confrontés les établissements publics de santé, particulièrement sur le plan budgétaire.
UN CONTEXTE POLITIQUE DÉTERMINANT ET INÉDIT POUR L’AVENIR DE L’HÔPITAL ET DU MÉDICO SOCIAL PUBLICS
Les ressources allouées à l’hôpital public ne sont pas à la hauteur des coûts qu’il supporte au titre de ses missions. Si ce sujet n’est pas traité lors du prochain PLFSS, l’hôpital risque de revenir trois voire sept ans en arrière, au niveau de 2017 qui fut l’une des années les plus difficiles pour la situation financière des hôpitaux publics.
Avec un déficit approchant les 1,9 milliards en 2023 et dépassant les 2 milliards en 2024, l’hôpital public est en danger, pénalisé en particulier par une sous-évaluation de l’impact de l’inflation sur ses charges de fonctionnement, que la FHF estime à 1,3 milliards pour le seul hôpital public et à 1,8 milliards pour l’ensemble des établissements publics et privés.
La FHF demande donc une réévaluation urgente de l’ONDAM établissements de santé 2024 qui permette de flécher 2,4 milliards d’euros (1,8 milliards pour l’inflation et 600 millions d’euros en compensation de l’avantage fiscal dont bénéficient les établissements privés).
Un tel décalage entre les besoins de l’hôpital public et les ressources allouées met directement en danger sa capacité à assumer ses missions de service public. C’est pourquoi la FHF appelle les pouvoirs publics à la responsabilité et dresse une liste de priorités claires pour le PLFSS 2025 :
- Le soutien aux missions de l’hôpital public pour réduire le sous-recours aux soins
- Une loi de programmation en santé ciblée sur l’investissement public et la recherche
- La révision des modes de régulation de l’ONDAM
- La sanctuarisation du financement de l’investissement public
- L’encadrement des centres de soins non programmés
- Le soutien financier des mesures de réorientation des urgences vers des solutions plus adaptées aux besoins des patients
Ces enjeux appellent un soutien clair des pouvoirs publics, équivalant à une hausse de l’ONDAM 2025 de l’ordre de 6,3 milliards d’euros pour les établissements de santé, soit + 6 % par rapport à l’ONDAM initial 2024 (dans le cas où il ne serait pas rectifié en 2024 au niveau que demande la FHF).
Le contexte est également très préoccupant du côté du secteur médicosocial. Au moment même où la société vieillit, 85% des EHPAD publics sont en déficit - avec un déficit cumulé 2022/2023 estimé à 1,3 Md€ pour les seuls EHPAD publics - situation inédite qui illustre une dégradation généralisée confirmée par l’enquête.
Ces déséquilibres budgétaires peuvent mettre en péril l’existence d’une partie de l’offre médico-sociale publique. C’est pourquoi la FHF appelle à un plan de sauvetage des établissements les plus en difficulté et à la correction des inégalités socio-fiscales qui continuent d’exister avec le secteur privé à l’occasion du PLFSS 2025.
Plus spécifiquement :
- Pour 2024, la FHF demande un "dégel" de la réserve prudentielle de 134 M€ et l’affectation des excédents de la branche à l'investissement et à un plan de sauvegarde des ESMS en difficulté ;
- Pour 2025, la FHF recommande une progression d’au moins 6 % de l‘Objectif global de dépenses (OGD) médico-social pour leur permettre de tenir les engagements pris en termes de créations de places et d’emploi dans les EHPAD.
Enfin, la FHF rappelle sa demande d’adoption d’une loi de programmation sur le Grand âge. Alors que le précédent gouvernement s’était engagé à créer 50 000 postes dans le secteur d’ici à 2030 et que la révolution démographique s’accentue, celle-ci est plus urgente que jamais.
Pour Arnaud Robinet, président de la FHF :
La situation des hôpitaux publics comme des structures médicosociales est critique. Tout juste sortis d’un nouvel été de tensions, les hôpitaux abordent la rentrée dans une situation financière plus dégradée que jamais, à des niveaux tels qu’ils ne sont plus supportables. Des signaux positifs existent, sur les ressources humaines entre autres, qui doivent être soutenus pour que les établissements puissent sortir la tête de l’eau. Dans l’immédiat, un soutien financier conséquent est attendu pour financer enfin l’hôpital et les EHPAD publics à hauteur des coûts qu’ils supportent. La priorité est de compenser les coûts de l’inflation, qui sont considérables. À moyen terme, il faudra engager les réformes que défend la FHF de longue date pour rendre notre système de santé plus efficient, en matière de pertinence des soins par exemple. C’est la seule solution pour préserver notre bouclier sanitaire sans détourner le regard du contexte contraint des finances publiques.